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Comme je n’étais pas encore assez en food coma hier après-midi, je me suis trainée jusqu’à un « Frenchgiving » assez haut de gamme. Il y avait un chapon. Et du fromage. Et mon copain Nemo qui arrivait de Paris et n’avait pas dormi depuis 36 heures puisqu’il avait préféré boire de l’Armagnac.

Casting hétéroclite et musique improbable. Dans l’immense majorité, des filles, en pleine digestion. Le Professeur Tournesol, qui recevait, était en pleine forme.

Au moment où une farandole de fromages est arrivée sur la table et où tout le monde a poussé un « aaaaaaaah! » mêlant l’effroi, l’admiration, et d’autres sentiments dont on aurait jamais pensé que trois fromages pouvaient les susciter, je me suis écriée intérieurement « Fiat Lux! » car j’ai une vie intérieure très riche et surtout aussi haut de gamme que le chapon.

On était au cœur de la Psychose Du Français A New York. Alors que New York est probablement la ville du monde où l’offre gastronomique est la plus large, le Français -toi, mon frère, mon semblable, aime tout particulièrement se plaindre de la « malbouffe » (un mot très vilain soit dit en passant). C’est un peu comme la peur de manquer, comme viscéral. Il y a tant de traumatismes et de charge inconsciente derrière cette psychose que ses manifestations peuvent être extrêmement déstabilisantes.

La Petite Normande, Camembert Fabriqué en Normandie, Saffrey Frères, St-Loup-de-Fribois par Crèvecoeur en Auge (Calvados) – 45% de Matière Grasse
A noter: c’est précisément le camembert préféré d’une célébrité de ma connaissance et le packaging est juste génial.
VoilaVoila.. deux informations très excitantes en une seule légende!

 

Mettez un camembert sous le nez d’un Français qui habite ici, vous obtiendrez ce résultat:

– l’excitation fébrile: il dira d’abord « Haaaaaan! Mais c’est géniaaaaaal!!! Ça fait tellement longtemps que j’en ai pas mangé!! ». Je pense que si vous ressuscitez Sid Vicious et que vous lui mettez de l’héroïne dans les mains, vous avez la même réaction.

– la volupté: ensuite votre compatriote goutera le camembert en fermant les yeux et avec toute la gestuelle sacrée de celui qui s’apprête à atteindre le nirvana. (étape très gênante)

– la désillusion: après avoir mangé la moitié du fromage, le Français débute son monologue critique: (1) ce n’est pas comme les fromages en France, (2) ils ne comprennent rien a rien ces Américains, (3) de toutes façons, ce pays, c’est l’horreur, ils ne savent pas se nourrir ces barbares, (4) ouverture possible sur la guerre en Irak.

– la confidence: après avoir règle leur compte à ces sauvages hirsutes que sont les Huns les Américains, votre Français prendra un air intimiste et vous livrera ces bonnes adresses pour acheter de la came du fromage, persuadé qu’elles sont secrètes (alors que généralement non), et rares (absolument pas, cf ce merveilleux reportage).

A noter: comme il est aussi facile de trouver du bon fromage à New York que de trouver une prostituée à Las Vegas, le Français est en réalité très souvent amené à en consommer mais il se gardera de le mentionner. Il occulte.

L’estomac: la porte d’entrée pour comprendre la passion française, son romantisme ridicule et grandiose -mais surtout, toujours démesuré (le propre de la passion en même temps).

Manger est systématiquement source de débats épuisants qui mêlent un sentiment national mignon et une malhonnêteté intellectuelle toute hexagonale.

Psychose

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Vive la France !

Ce soir j’étais à une sorte de réunion mondaine de haut vol. L’ouverture officielle de la boutique Kayser à New York. Le haut du panier les amis.

Je ne suis passée qu’une demi heure (le temps minimal décent pour avoir un goody bag), mais j’ai vu -je crois- tout ce qu’il y a à voir.

– Les « Jean-Paul Trader ». Il n’est pas vraiment trader, car les vrais traders n’ont pas le temps pour ce genre de bêtises. Le mec qui a fait son école de commerce à la con et qui est cadre sup dans une banque. J’adore ce genre de mecs. Ils sont contents d’être la. Contents d’être le roi du pétrole dans le « milieu frenchy » de New York, contents de pouvoir ouvrir, non pas un, mais DEUX boutons de chemise (la fo-lie!), contents d’expliquer a la Vénézuélienne d’à coté ce qu’est le brie, contents d’eux. Le mec ne se pose juste pas de question et reprend du brie. Mais comment lui en vouloir? Ces mecs sont juste trop sympas. Surtout « trop ». A noter aussi, le Jean-Paul en question n’a pas été informé qu’on ne porte plus de Pento depuis 1988; ni que conclure une conversation avec un compatriote par: « on se keep in touch » n’est PAS cool. Ni « cajoual » (casual).

–  Le Jean-Paul Upper East Side versions père et fils. Le père a OBLIGATOIREMENT un polo Lacoste- pour porter haut les couleurs de la France (comme mon père, donc je connais la chanson). Il n’a pas remis les pieds en France plus de deux semaines d’affilée depuis son arrivée aux « USA ». Pour lui, l’Amérique c’était le folklore américain, et il n’a pas trop change depuis. Comment lui en vouloir? Mes propres grands-parents, des gens admirables, qui ont plus ou moins le même âge, pensent pareil. Sorte de collabo du chauvinisme, le Jean-Paul UES adore faire des soirées fromage avec sa bourgeoise dans leur condo de la 77e, autant que de donner son avis sur la libéralisation de l’économie quand il passe une semaine en vacance à Biarritz avec ses vieux potes des Mines. Du coup, la guerre en Irak ou les JO sont vraiment un casse tête pour cet authentique franco-américain. Jamais content mais toujours un mot à dire. Ce Jean-Paul est un bon client.

Le fils de Jean-Paul Upper East Side est un mec marrant. On le surnomme aussi “Jean-Flan”. Il porte soit la mèche (jusqu’à 20 ans), soit du Pento. Quand c’est les 2 en même temps, c’est un cas d’école: twittez-le. En été, il porte généralement un bermuda corail et un t-shirt gris chiné. Souvent il a les yeux clairs, ou au moins le regard des amourettes d’été. Scolarisé au LFNY, ou Lycée Français pour ceux qui vivent en Arizona, le fils a bien intégré les codes américains. Un peu trop. Il répète le discours de son père (comme nous tous, n’allez pas croire) selon lequel: « les Français sont des cons, mais moi je ne suis pas américain. Je suis Francais. C’est la classe. »  Déconcertant sophisme. Peu importe que le Jean Paul Upper East Side soit un peu studieux et malin et ait donc réussi le braquage de faire ses études aux US -UCLA si possible, ou que paresseux et/ou un peu lent il ait échoué dans une école moyenne en France. Le JP Upper East Side fils aime la France: il aime David Guetta, ou Justice, au choix. Mais il aime aussi les États-Unis, surtout les cheeseburgers et les road trips. Comme tout le monde souscrit plus ou moins soit au short corail, soit à David Guetta, soit au cheese trips, tout le monde l’aime bien.

–   les Jean-Paul Oiseaux De Nuits. Persuadés d’être descendants directs de la Factory, ils dont sursapés et travaillent plus ou moins dans les médias ou la culture -autant dire la même chose. Pique assiette talentueux, soit barrés, soit cultivés: ils sont de bonne compagnie. Cosmopolites, ils sont contents d’assister à des événements francophones, ou francophiles. Le pays de DSK (sexe), Beigbeder (drogue), et Louis de Funès (art de vivre rock’n’roll)
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–       les Jean-Paul It Girls. Pas besoin de vous faire un dessin. De toutes façons ces créatures sont bien mystérieuses. Il est toujours difficile de leur soutirer un commentaire. Elles sont plus généreuses en sourires, on ne va pas les blâmer.

Juliette Récamier – François Gérard (détail)

–       – le Jean-Paul Erreur de Casting. Il est plus ou moins mal habillé et gauche. Il croit par exemple que le col tunisien est encore cool et ne sait jamais s’il doit serrer la main ou faire la bise. Propulsé dans cette stratosphère mondaine de part sa simple nationalité, il connait ses compatriotes New-Yorkais mais n’appartient qu’au même pays qu’eux. Potes du club de pétanque, ou de l’Alliance Française (c’est sa femme, Stéphanie, qui l’a obligé), ses copains socialites le font rigoler-parfois il ne sait pas trop pourquoi. Il peut habiter le New Jersey, chic (maison a Oakland), ou moyen (appart a Hoboken). Il parle relativement peu. Dans 80% des cas pour dire quelque chose d’assez intéressant, et souvent d’original.

–       le Jean-Paul Grinçant comme l’orchidée et moi. Elles n’ont pas pu résister au pain complet gratuit.

Et quelques autres. Bref, c’était super sympa.

 

 

 

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